J’aime
J’aime les gens qui n’ont pas le genou en terre et ceux que l’orage ne fait pas tomber en prière,
les gens ayant recours à l’homme au moment du malheur et ceux qui, lorsque s’avance le Prophète le laissent passer,
les gens ne se donnant pas plus de saison que la rose et ceux qui ignorent qu’ils ont peut-être raison,
les gens qui n’affirment rien et s’animent avec le doute comme habit de rechange.
J’aime ceux que la contradiction n’effraie pas.
J’aime les gens qui ne savent jamais quel vêtement mettre en se levant tant le temps est incertain comme la vérité,
les gens n’ayant d’autre choix que la parole provisoire et le silence de l’invisible,
les gens remettant tout en cause parce que la lumière n’est plus que l’ombre de ce qu’ils perçoivent.
J’aime ceux qui vacillent après leurs hautes études et vieillissent en sachant de moins en moins,
les gens qui croient que le chemin ne mène nulle part si ce n’est ici,
les gens que l’Oracle laisse incrédule,
J’aime ceux sans livre de chevet, seraient-ce les miens, mais qui ont à la place l’intuition et l’instinct.
J’aime les gens ne sautant pas sur le dernier avion pour aller ailleurs et ceux qui ne disposent de leurs bagages qu’au moment de s’en aller pour toujours.
extrait de Fêtes d’ombres
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